Faire taire son critique intérieur en 4 étapes
# 21 - ... car les critiques extérieures c'est déjà suffisant à gérer
Hello 👋🏼
Bienvenue dans ce numéro 21 de tchik tchak !
Pour rappel, tchik tchak c’est la newsletter sur l’écriture avec des solutions & des idées. Elle s’adresse à tous ceux qui sont curieux et qui veulent écrire, professionnellement ou non, que ce soit des histoires ou des scénarios.
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En un coup d’oeil :
C’est qui lui encore
Lui couper la chique en 4 étapes
La boîte à inspiration avec un mystère millénaire résolu et des supers bouquins
“C’est nul ! Ça a déjà été dit 1000 fois ! BI-DOOON ! Et puis pour qui tu te prends ? Et arrête de jouer avec tes cheveux !”
Tiens, bonjour petite voix et douce mélodie. Prends un café, installe-toi je t’en prie, empêche-moi de travailler et mine mon moral, à ton aise, Blaise.
Cette voix on la connaît toutes et tous : c’est celle du Critique Intérieur, celle qui juge, critique et paralyse, souvent avant même que l’on ait essayé quoi que ce soit, parfois pendant, quelque fois après, un véritable petit service 24/24h.
Dans Embracing Your Inner Critic: Turning Self-Criticism into a Creative Asset de Hal et Sidra Stone, les auteur·ices disent qu’il est là pour nous protéger, nous éviter de souffrir, nous éviter des douleurs émotionnelles en nous forçant à rester dans nos zones de confort…
Moi je pense surtout que c’est le fruit de deux influences néfastes pour la créativité : l’enfant de la Peur du Jugement et de la Pression Sociale.
Que des influences qui nous empêchent de nous réaliser pleinement.
Notre mission est donc simple :
Préserver notre Créativité de cet autocritique pour lui octroyer de véritables créneaux d’expression libre ou rien ni personne ne lui fera des gnagnagna.
Pour cela, 4 étapes à suivre 👇🏼
1️⃣ Le personnifier
C’est une technique de distanciation classique, et l’idée est d’être conscient que le seul rôle du Critique Intérieur est d’être un saboteur.
C’est ce que fait Danny Gregory dans son livre Shut Your Monkey: How to Control Your Inner Critic and Get More Done. Pour lui c’est un petit singe surexcité.
Voilà le mien. Il s’appelle Blaise, et à l’image de son faciès replié sur lui-même il est aimable comme une porte de prison. Quand il parle ses bajoues font bl-bl-bl-bl et ses postillons s’envolent dans tous les sens. Il n’a rien fait de sa vie à part mettre tous les matins un chapeau pour se donner de l’importance, et surtout il ne supporte pas que les gens créatifs tentent, soient curieux, proposent des choses - soient beaucoup plus libres que lui en somme. Du coup il rabaisse tout, tout le temps, et c’est un trou noir de négativité1.
Bref, on n’aime pas Blaise. Et les vôtres ?
2️⃣ Apprendre à le reconnaître
Là où les Critiques Intérieurs pensent qu’ils ont un coup d’avance sur nous, c’est parce qu’ils parlent dans nos têtes. Ils pensent donc qu’on va forcément les écouter, que leurs paroles toxiques peuvent passer pour de vraies réflexions intéressantes et légitimes issues de la belle partie de notre cerveau.
Que nenni. Tout ce qu’on entend dans nos têtes, toutes nos pensées ne sont pas légitimes et à prendre au pied de la lettre. Ce sont juste des pensées qui vont et viennent, certaines sont intéressantes, d’autres beaauuucouuup moins.
(Récemment je me suis demandé si les gens avaient du FOMO à la Renaissance et je me suis dit que les articulations de doigts c’est un peu comme des genoux de doigts).
L’idée ici est donc de prendre conscience de quelles sont les pensées qui émanent du Critique Intérieur et de les reconnaître comme telles. On a de la chance, ils parlent tous de la même manière et sont très facilement reconnaissables. Voici leurs tactiques :
Ton négatif et décourageant : ça c’est sa marque de fabrique, le plus facile pour le reconnaître. Il peut s'exprimer par des pensées telles que “Je ne suis pas assez doué·e”, “Je ne vais jamais réussir”, ou “C'est ridicule, personne ne voudra lire ça“.
Comparaisons défavorables : si vous vous comparez constamment aux autres, en vous sentant toujours inférieur·e, c'est probablement votre critique intérieur qui parle, mais ne vous y méprenez pas : c’est lui qui a un énorme complexe d’infériorité face à votre créativité.
Prédestination : l'utilisation de termes comme "toujours" et "jamais" peut être un signe. “Je fais toujours des erreurs” ou “Je n'arrive jamais à finir ce que je commence”, c’est en fait votre critique intérieur qui veut vous mettre des poids aux pieds (les critiques intérieurs n’aiment évidemment pas le changement).
Peur de l'échec : une peur intense de l'échec ou du jugement peut être amplifiée par le Critique Intérieur, vous empêchant de prendre des risques ou d'essayer de nouvelles choses (son Parent 1 est la Peur du Jugement, ça laisse des traces).
Perfectionnisme : une exigence de perfection absolue pour soi-même, au point de ne jamais être satisfait de son travail, peut être un signe que le critique intérieur domine. Il vous fait croire qu’il faut que tout soit parfait, sachant bien sûr que ce n’est pas possible, juste dans l’espoir de vous empêcher de vous lancer.
Procrastination : la procrastination, souvent causée par la peur ou l'anxiété liée à l'évaluation de votre travail, peut être un signe que vous écoutez votre critique intérieur au lieu de vous engager pleinement dans votre créativité en faisant confiance au processus et au fait que les avancées se feront à leur rythme.
⚠︎ Distinguer le critique intérieur de la critique externe : il est évidemment important de ne pas confondre les deux. L’astuce principale étant que le critique interne se trouve dans nos têtes alors que la critique externe vient d’un autre être humain à l’extérieur de nous. Le critique interne est généralement ancré dans la négativité, la peur et l'insécurité, tandis que la critique externe peut apporter de nouvelles perspectives ou un retour d'informations précieux. Pour apprendre à la gérer, suivez le guide :
3️⃣ Lui couper la chique
Maintenant qu’on l’a personnifié et repéré, arrive le moment du face-à-face : comment le gérer, lui répondre et le dégoupiller ?
Ecrivez les paroles de votre critique dès que vous les entendez.
Questionnez la validité de ces pensées.
Demandez-vous : "Est-ce vraiment vrai ? Ai-je des preuves concrètes de cela ?". Si la réponse est objectivement oui, continuez : “Et alors ? Est-ce que ça doit m’empêcher de créer ou écrire ?” Généralement la réponse sera non.Réécrivez ces pensées de manière plus objective ou positive. Ainsi, une pensée limitante devient une opportunité de croissance, elle crée un chemin vers la progression et ouvre la porte à l’apprentissage et à l’action.
La technique du "pas encore mais" peut aider ; il suffit de remplacer "je ne peux pas" par "je ne peux pas encore, mais".
“Je ne suis pas un bon scénariste” devient “Je ne suis pas encore un bon scénariste mais je peux continuer à apprendre et à lire pour m’améliorer.”
“Mon histoire va plaire à personne” ➞ "Je crains que mon histoire ne plaise pas encore à quelqu’un mais je peux me concentrer sur le fait d'écrire une histoire qui me passionne, ce qui augmentera ses chances de toucher les lecteurs qui partagent mes intérêts."
“Je suis bloqué·e, je ne vais pas y arriver” ➞ "Je me sens bloqué·e et je ne sais pas encore comment continuer mon histoire, mais je peux écrire une scène qui m'inspire maintenant et trouver plus tard comment elle s'intègre."
“J’ai pas envie d’écrire aujourd’hui” ➞ "Je n'ai pas encore envie d'écrire aujourd'hui, mais je m'engage à écrire au moins 200 mots pour maintenir l'habitude."
(On en parlait ici).
“Ce premier chapitre/acte/scène est nul·le” ➞ "Je n’en suis pas encore satisfait·e mais je me rappelle que le premier jet est fait pour être imparfait et que je pourrai le retravailler plus tard."
(On parlait de l’importance des premiers jets ici).“Ma vie n’est qu’une grande zone de doutes” ➞ "Je doute encore, mais je me souviens que même les auteur·ices “à succès” traversent les mêmes doutes que moi et que ça fait partie d’une vie créative."
“C’est trop compliqué, je n’y arriverai jamais” ➞ "Je lutte encore pour développer ce point complexe, mais je peux prendre le temps de faire des recherches approfondies ou de créer des arbres d'histoire pour clarifier mes idées."
N’hésitez pas à rayer en rouge les pensées initiales de votre critique pour les remplacer par ces affirmations intentionnelles, car bon ça va un moment les postillons hein.
4️⃣ Se créer un environnement de soutien
Enfin, la dernière étape pour maîtriser son Critique Intérieur, c’est de se créer un environnement dans la vraie vie avec de vrais êtres humains qui parlent :
S'entourer de personnes bienveillantes qui traversent les mêmes problématiques, comprennent, encouragent et soutiennent.
Rechercher des communautés d’auteur·ices et scénaristes pour partager des expériences et des conseils.
Je vous conseille d’aller jeter un oeil au Forum des Auteurs créé par Hadrien & Mathieu (de l’excellent podcast “Y a plus de papier !“ qui rythmait mes journées quand je me suis lancée dans le scénario).Demander des retours extérieurs “objectifs” et apprendre à distinguer les critiques constructives des négatives.
Suivre ces quatre étapes devrait vous permettre de tenir votre Critique Intérieur à distance, au moins le temps que votre Créativité puisse s’exprimer sereinement.
Mais l’objectif ultime est d’accepter qu’il fait partie du processus créatif et qu’il ne pourra jamais vraiment disparaître.
Dans Big Magic, Elizabeth Gilbert résume la situation en imaginant chaque nouveau projet comme des road-trips entre elle et sa créativité - et ce forceur encombrant :
“Si tu dois venir, viens, mais qu’on soit clair : seules la Créativité et moi prenons des décisions en cours de route.”
On te tolère Blaise, mais mange ton chapeau, merci.
✌🏼
Cette semaine dans la boîte à inspirations et recommandations, nous avons :
🌐 Mes deux derniers articles pour la Revue de la Cité :
l’héritage de Frances Marion, la plus grande scénariste du début du siècle, qui a tout remporté (4 Oscars, scénariste la mieux payée des années 20 et 30 hommes et femmes confondus) mais qui n’a jamais oublié les scénaristes moins bien loti·es, si bien qu’elle a mis sa notoriété en jeu pour défendre sa profession - quitte à s’attirer les foudres des studios
le mystère autour de Marguerite Bertsch, qui disparaît subitement des radars à 31 ans alors qu’elle est à l’apogée de sa carrière. À sa mort, le flou concernant sa vie va même jusqu'à son avis de décès, qui est incorrect - mais qui est un bon point de départ pour essayer de comprendre. En remontant la piste, je suis tombée sur du talent, la première bible pour scénaristes de l'histoire, des critiques dithyrambiques, une disparition mystérieuse et des jouets pour enfants.
😯 L’oeuf ou la poule, qui est arrivé en premier ? On a ENFIN la réponse. En gros, tout le monde se prend la tête depuis des siècles car l’énoncé n’est pas clair : parle-t-on d’oeuf de manière générale ou d’oeuf de poule ?
Si on reprend, “L’oeuf ou la poule ?” c’est l’oeuf (les dinosaures pondaient), par contre “L’oeuf de poule ou la poule ?”, c’est la poule (il fallait bien qu’elle le ponde)(ça semble très logique soudainement).
📚 Les trois livres d’
, Steal Like an Artist, Show Your Work! et Keep Going. Personnellement ce sont mes bibles, c’est décomplexant, captivant, plein de conseils super pratiques qui débloquent la créativité à tous les étages.🕰 En ce jour il y a 35 ans, le 23 mars 1989, on a tous failli y passer. Un astéroïde de la taille d’une montagne est passé à 700 000 kilomètres de la Terre. Bon, dit comme ça ça a pas l’air dramatique, mais pour les géophysiciens c’est l’équivalent d’un poil de cheveu. C’est également aujourd’hui, il y a 185 ans, dans l’édition du 23 mars 1839 du Boston Morning Post, qu’apparait pour la première fois le terme “O.K.”, abréviation de “Oll Korrect”, altération graphique de “all correct”, version familière de l'époque du “all right”. 180 ans plus tard, OK rentre dans l’histoire.
💬 la citation de la semaine :
“Before you criticize someone, you should walk a mile in their shoes. That way when you criticize them, you are a mile away from them and you have their shoes.” —Jack Handey
Dans le prochain tchik tchak…
… on parlera de comment créer un arbre de décisions pour nos personnages
Et pour rattraper les anciens numéros c’est 👉🏻 par ici 👈🏻
À la semaine prochaine !
Pauline
Toute ressemblance avec des personnes réelles est purement intentionnelle. Volez loin au-dessus des trous noirs de négativité.
Pauline, je crois que cette lettre va aider grand nombre de personnes (dont moi). Merci 🫶
La citation de fin est géniale 😄 Vive la team 1er degré