Comment survivre pendant les phases d'attente
# 32 - ... ou l'on découvre que le plus dur n'est pas d'écrire
Hello 👋🏼
Bienvenue dans ce numéro 32 de tchik tchak !
Pour rappel, tchik tchak c’est la newsletter sur l’écriture avec des solutions & des idées. Elle s’adresse à tous ceux qui sont curieux et qui veulent écrire, professionnellement ou non, que ce soit des histoires ou des scénarios.
En un coup d’oeil :
Attendre constamment, cette souffrance
Être une maman tortue marine
La boîte à inspiration avec Jane Eyre en 8-bit et Benjamin Franklin, ce grand foufou
Une carrière de scénariste, ce n'est pas seulement beaucoup d'écriture et de réécriture, c'est surtout BEAUCOUP BEAUCOUP d'attente ; une attente particulièrement désagréable car on ne sait jamais à quel sauce on va être mangé :
Attendre le retour d’un festival ou d’une bourse
Attendre le retour des producteurs
Attendre le retour de vos agents
Attendre d’être payé·e
Attendre le retour d’un diffuseur / distributeur
Attendre le retour d’un·e comédien·ne, d’un·e réal
Attendre d’être payé·e
Or, certaines études1 montrent que les périodes d'attentes incertaines sont celles qui génèrent le plus de souffrance. Yay !
Et c’est également durant ces périodes que se réveillent nos critiques intérieurs. Double Yay !
(👇🏼)
Pas d’autres choix : à défaut de révolutionner le système, pour survivre lors de ces phases d’attente (juste lors de son quotidien de scénariste, du coup), on doit apprendre à développer sa résilience.
Grâce aux travaux de Sarah Schnitker, professeure associée de psychologie et de neurosciences, et spécialiste de la patience, j’ai découvert qu’il y avait 2 variables qui entrent en jeu, et donc 4 grandes attitudes & réactions liées à ces moments d’attente incertaine.
Les voici :
Evidemment, nous ce qu’on veut c’est être en haut à gauche : se diriger calmement vers ses objectifs, en étant patient & sachant ce que l’on veut.
Et pour y arriver, on va s’inspirer des mamans tortues marines.
Être une maman tortue marine
Petit point zoologie :
Après avoir pondu leurs œufs sur la plage, les femelles tortues marines retournent à la mer, abandonnant leurs œufs à leur sort. Les petits doivent éclore, atteindre l'océan et survivre seuls sans aucune aide parentale.
Pourquoi ?
Au cours de l'évolution, les tortues marines se sont adaptées pour maximiser leurs chances de survie dans un environnement marin où la prédation est élevée. Une fois que les femelles ont pondu leurs œufs, elles retournent à la mer pour se nourrir et se préparer pour la prochaine saison de reproduction.
C’EST PAREIL POUR LES SCENARISTES.
Je vous le refais :
Après avoir envoyé leurs projets à qui de droit, les scénaristes retournent au travail, abandonnant leurs projets à leur sort. Les projets doivent être lus, taper dans l'oeil et trouver un autre élan de vie chez une tierce personne sans aucune aide parentale.
Pourquoi ?
Au cours de l'évolution, les scénaristes se sont adaptés pour maximiser leurs chances de survie mentale dans un environnement audiovisuel où la déception/maltraitance est élevée. Une fois que les scénaristes ont envoyé leurs projets, ils retournent au travail pour se nourrir et se préparer pour la prochaine salve d'envois.
Nous sommes donc toutes et tous des mamans tortues marines.
Une seule solution : continuer à pondre écrire.
Vous doutez encore de cette analogie ? Laissez-moi vous convaincre d’y croire :
Les 3 avantages d’être une maman tortue marine
Être dans le futur : vous n'êtes pas dans cette carrière pour vendre un seul scénario, vous êtes là pour le long-terme - alors continuez à écrire. Votre seul objectif est de pondre la prochaine fournée, pas de vous assurer que vos petits vous retrouvent.
Être toujours sexy2 : quand le producteur (par exemple) reviendra enfin vers vous, que ce soit pour acheter ou refuser votre projet, et quand il vous demandera si vous travaillez sur autre chose, vous pourrez répondre “Un peu mon neveu, regarde cette gestation” (sexy), plutôt que “Non, je suis en PLS depuis 3 semaines en attendant ton retour” (pas sexy)
Être dans son présent créatif : finalement qu’importe le retour qu’on lui fait sur ses textes, la maman tortue marine est toujours dans l’excitation du prochain projet, et donc de son présent créatif - donc rien ne peut l’atteindre. Bon elle a peut-être moins besoin de croquettes que nous aussi, mais on AIME cette attitude.
Et peut-être qu’un jour vous verrez un de vos petits vous retrouver au fin fond de l’océan, accompagné d’un producteur agrippé à sa carapace qui vous dit “BlblblblblBlblblblblBlblblblbl” en faisant des grosses bulles, ce qui se traduit par :
“Ce petit a de l’avenir, je veux le signer dans mon équipe de petites tortues marines pour espérer le vendre à l’Océanopolis de Brest.”
Et vous direz OUI. Quel bel avenir.
Puis vous n’aurez plus qu’à attendre sa proposition financière. Puis le retour de votre agent. Puis les allers-retours de la négociation. Puis la signature. Puis…
Mais qu’importe, vous serez déjà concentré·e sur la prochaine saison de reproduction3.
✌🏼
Si vous avez appris des trucs, appréciez cette lecture du samedi, et souhaitez soutenir mon travail, vous pouvez m’offrir un petit sandwich défiscalisé 👇🏼 🌟
Ou alors le partager autour de vous, ça m’aide beaucoup également. Merci !
Cette semaine dans la boîte à inspirations et recommandations, nous avons :
🗞 La Revue de la Cité est de retour pour son troisième cycle ! Cette fois je vous emmène pour une plongée en trois épisodes dans le Cinéma d’animation en Afrique.
Pour ce premier épisode, je retrace l’histoire de l’animation en Afrique subsaharienne, de ses débuts à nos jours, histoire qui s’est écrite sur le même fil que celle de la décolonisation du continent.
💥 Cette intelligence artificielle qui transforme les classiques de la littérature en jeux vidéos - ça s’appelle Playbrary, c’est soutenu par le National Reading Movement, et on peut incarner les héro·ïnes de Jane Eyre, Frankenstein, Sherlock Holmes, et plus de 1000 autres livres du domaine public.
🕰 En ce jour il y a 272 ans, le 15 juin 1752, Benjamin Franklin (le même qui prenait des “bains d’air” tout nu face à sa fenêtre) invente le paratonnerre en jouant au cerf-volant sous la foudre. Franklin c’est également le nom d’une tortue à casquette rouge qui sait lacer ses chaussures, et qui est devenue célèbre sans passer par l’Océanopolis de Brest.
Le 15 juin c’est également la journée mondiale de sensibilisation aux passages à niveau, nos maîtres à toutes et tous en terme de comment survivre aux phases d’attente.
💬 La citation de la semaine :
“La patience n’est pas la capacité à attendre, mais la capacité à attendre tout en gardant une bonne attitude” - Joyce Meyer
Dans le prochain tchik tchak…
… on parlera de comment apporter de la légèreté dans un monde de noirceur.
Et pour rattraper les anciens numéros c’est 👉🏻 par ici 👈🏻
À la semaine prochaine !
Pauline
Two definitions of waiting well (2016), étude de Sweeny, Kate; Reynolds, Chandra A.; Falkenstein, Angelica; Andrews, Sara E.; Dooley, Michael D.
On en écrit de ces choses quand même.
Je suis perturbée maintenant. Cela veut-il dire que le seul objectif d’une tortue marine est de se faire engrosser, pour pondre, puis se refaire engrosser ad vitam æternam ? Moi qui pensais que cette analogie était criante de vérité, je n’ai plus aucune idée de ce que je vous conseille ici. Sauf si on se dit que notre objectif est de se faire engrosser par des idées ad vitam æternam. Ah oui ça fonctionne. OUF.
Compte sur moi pour être dans l action surtout jusqu au 7.....après qui sait.
J'ai absolument RI pendant toute ma lecture de ta newsletter ! Elle est incroyable (et très utile, pour moi qui attends très impatiemment le retour d'une éditrice snif). Merci pour tout ça !